Ramadan au Sénégal : le calvaire pour certains

25 juillet 2014

Ramadan au Sénégal : le calvaire pour certains

ramadanLe mois de ramadan est une période de jeûne, de prière, d’abstinence et de partage. Le Sénégal étant un pays laïc à dominance musulmane, dont la cohabitation avec la communauté chrétienne est exemplaire partout dans le monde. Cependant le mois de ramadan appelé carême chez les chrétiens se vit et se  fait différemment au Sénégal.

 

Les difficultés pour trouver à manger

Chaque matin j’ai du mal à trouver du pain, après trois tours de boutiques rien;  tout est fini. Je suis obligée d’attendre jusqu’à 17 heures pour en avoir et pendant ce temps je me contente de mon café au lait. Il est midi, c’est la pause,  on devrait dans les normes se restaurer. Mais devinez quoi ? La dame qui a l’habitude de nous faire à manger a triplé le prix d’une assiette de riz vendu au paravent à 700 F Cfa. Raison invoquée : la diminution de la quantité qu’elle préparait. Ce manque à gagner est supporté par les pauvres clients qui n’ont pas jeûné.

J’ajoute que le fait de manger à proximité de ceux qui font le ramadan peut paraître dérangeant voir choquant pour certains. Il fait une chaleur terrible à Dakar, j’étais dans un bus, et j’avais tellement soif que j’ai voulu boire de l’eau. Je n’avais avalé qu’une gorgée, un monsieur me fixa méchamment et me demanda pourquoi vous ne faites pas le ramadan ?

Et moi de lui répondre : Vous n’êtes pas seul dans ce pays monsieur. J’ai trop soif donc je bois.

Pour rompre le jeûne il faut acheter du pain le plus souvent. Les files indiennes qui se forment aux heures de rush aux pâtisseries ou aux boulangeries n’incitent pas à l’attente. C’est pourquoi soit j’y vais avant ou après pour avoir ma miche de pain.

 

Le gaspillage durant ce moisphoto ndogou

J’ai remarqué que c’est durant le mois de ramadan que les grandes surfaces doublent ou triplent les stocks notamment celui de la charcuterie. C’est une occasion pour certains de manger ou trop manger de saucissons, de la viande hachée, du  gruyère, du jambon et j’en passe. Les uns sont motivés par le mieux-être de la famille, des enfants en particulier. D’autres se livrent au gaspillage et s’adonnent à  des invitations entre personnes ou amis de même classe sociale.

Le partage aura toute son importance et sa valeur s’il touche des pauvres ou des nécessiteux. A noter en cette période, les paniers « Ndgogou » (panier de rupture de jeûne) que des personnes s’imposent pour faire plaisir à la belle famille, aux tantes, aux parents… Ce qui est regrettable pour ces paniers est qu’il y a des gens qui s’endettent pour s’en procurer. Où est passé l’esprit de partage, de privation, de charité comme recommandé en cette période ?mendiants du Sénégal

 

 

 

 

 


une personne qui dort

 

Ralentissement du travail

Jeûner ne rime pas avec mauvaise humeur, tension, mauvaise mine, paresse… Alors que je m’étais rendue en centre d’état civil pour me procurer un extrait de naissance j’ai eu la malchance de tomber sur une personne qui  affichait une mine d’enterrement et manifestait de la mauvaise volonté pour d’abord me renseigner. J’ai dû attendre un temps très long avant d’obtenir mon extrait alors que dans ce pays on nous demande d’accélérer la cadence pour que les choses bougent et avancent. Mais dans ces conditions la bataille est loin d’être gagnée. d

 

 

Le port vestimentaire, une  grande sélection et les lieux de réjouissance presque fermés

Chanteuse senegalaiseDurant le mois  ramadan, on met les habits sexys dans les armoires. Les habits traditionnels et les habits amples refont surface. Les femmes surtout les jeunes filles font l’effort de s’habiller décemment, d’autres s’adaptent au moment : ramadan oblige. Les boîtes de nuit prennent presque leur congé le temps d’un mois. En 2006, j’étais allée en boîte avec des amis et devinez quoi ? Nous étions seuls, seuls dans la boîte et bien sûr avec le Didier et quelques serveurs. J’ai pour habitude d’emprunter une ruelle fréquentée par des belles-de-nuit sises à Fann résidence, mais durant ce mois, plus personne. Je me dis qu’elles au moins respectent le ramadan.

Un comportement pas toujours exemplaire

Durant ce mois de ramadan deux choses m’ont en plus choquée : l’une c’était dans un taxi clando ou chacun paye selon le trajet effectué. Le taximan me demande 300 francs et prend un jeune et lui fait payer 1 000 francs pour une distance moins importante que de la mienne. Cet homme avait-il jeûné ? J’en doute.

Au moment où j’écris ce billet (il est 1 h 13 du matin), les jeunes font du bruit, en faisant une traversée nocturne jusqu’à  l’aube, avant le premier repas de la journée (le kheude).

liqueurLa semaine passée, j’accompagnais la nounou de ma fille qui devait rentrer et l’heure de la coupure m’a trouvé sur le chemin du retour. J’étais surprise de voir deux personnes soi-disant venant de rompre le jeûne, se désaltérer avec de la liqueur.

lakhBien  qu’étant le  fruit d’un couple mixte, je vis mal durant le ramadan. Mais la fête de la korité est celle que je préfère, car les voisins, parents et amis te servent le succulent plat de « lakh » qui est un mélange de farine de mil en bouillie et de lait caillé accompagné de raisins, de coco râpé … Bon appétit !!!!

 

Lucile Ndiaye

 

 

 

 

 

 

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Commentaires

Julien
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Joli billet.
Bon appétit pour le lakh !

Serge
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Pas de diversité donc durant le Ramadan... ça en devient presque oppressif.. mais osera-t-on le dire?